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Visite de la ministre Martinez Ferrada au C2T3 affilié au Cégep de Trois-RivièresInternationalisation de l’enseignement supérieur : les grandes tendances
Perçue comme une innovation dans les années 2000, l’internationalisation de l’enseignement supérieur est devenue une pratique courante, voire la norme, pour la plupart des cégeps et des collèges francophones du Canada.
« Le concept d’internationalisation dans l’éducation et dans l’enseignement supérieur est associé au phénomène de la mondialisation de l’économie fondée sur la connaissance, mentionne le consultant en internationalisation Sébastien Linden, associé gérant de la firme française Linden & Swift. Cela signifie qu’aujourd’hui, dans l’ensemble des pays du monde, que cela soit en Chine, en Inde, au Brésil, en Russie ou en Afrique, l’enseignement supérieur et la recherche se développent. Il y a quelques années, les pays du monde anglo-saxon en Amérique du Nord et en Europe dominaient. »
« Il y a aussi la mobilité des personnes, notamment celle des étudiantes et des étudiants qui sont de plus en plus nombreux à changer de pays pour poursuivre leurs études, ajoute-t-il. De plus, il y a la mobilité des formations. Nous n’avons qu’à penser aux formations à distance, à celles délocalisées ou à celles proposées avec des partenaires. On peut même parler de la mobilité des capitaux, puisque l’enseignement supérieur est un marché de plus en plus privatisé. Par exemple, il y a une grande école de théâtre en France qui s’appelle le Cours Florent. Cette institution culturelle fait partie du groupe leader Galileo Global Education. Celui-ci finance d’une certaine façon les retraites de Canadiennes et de Canadiens étant donné qu’un fonds de pension canadien a investi dans cette entreprise. »
« Ce phénomène de mondialisation, poursuit-il, peut se traduire parfois par de la compétition. On va vouloir accueillir les meilleurs étudiants, attirer les professeurs les plus prestigieux et obtenir des financements de plus en plus importants pour la recherche. Il permet aussi la collaboration, parce qu’on va travailler ensemble sur des mobilités, des coopérations scientifiques et/ou des publications. Collaboration et compétition peuvent également se nourrir ensemble. »
Selon Monsieur Linden, l’internationalisation concerne l’ensemble des établissements d’enseignement supérieur et des disciplines. « Dans certains domaines, comme le commerce, indique-t-il, il y a davantage de concurrence. Les établissements cherchent à être le mieux côté possible dans les classements internationaux, une accréditation planétaire ».
Si les établissements d’enseignement supérieur ont avantage à se diriger vers ce concept d’internationalisation, Monsieur Linden croit qu’il faut parfois être vigilant afin que cette mondialisation ne devienne pas trop une globalisation, avec un modèle unique qui devrait s’imposer aux autres. En effet, un établissement ne doit pas, à son avis, se faire imposer un projet qui n’est pas forcément le leur.
La clientèle étudiante et la pandémie
« Les avantages de l’internationalisation de l’enseignement supérieur pour une étudiante ou un étudiant résident notamment dans la possibilité de dénicher une spécialisation qui n’existe pas dans son propre pays. Et puis, en partant à l’étranger, elle ou il va aussi développer ses compétences internationales et interculturelles, sa capacité à travailler dans plusieurs langues et avec des personnes de différents pays. Il s’agit de compétences recherchées par les recruteurs, par les employeurs », de dire Monsieur Linden.
« Si la pandémie a eu un impact important sur l’internationalisation, entre autres en mettant un coup d’arrêt aux mobilités, elle a néanmoins permis à plusieurs établissements de réfléchir à leur modèle d’internationalisation, à la façon dont ils contribuent à la formation des jeunes qui seront les décideurs de demain », ajoute-t-il.
Les pratiques numériques en enseignement supérieur favorisent assurément cette internationalisation. « La crise du coronavirus, poursuit M. Linden, a conduit à une accélération de la digitalisation dans l’enseignement supérieur, qui était un phénomène que l’on observait déjà au sein des établissements qui avaient poussé leurs réflexions relatives à la technologie et à la pédagogie. Pour certains enseignants et pour certains des étudiants, le changement a été un peu brutal, voire radical. Il y a une période d’adaptation, mais je crois que, aujourd’hui, il serait intéressant de dresser le bilan en matière d’’innovation pédagogique et de mobilités virtuelles.
Et l’avenir?
« Les établissements devront désormais, précise Monsieur Linden, être à l’écoute de l’ensemble des acteurs de leurs établissements et de leurs territoires. Ils devront travailler en partenariat, en équipe, avec des ONG, des associations locales et des entreprises qui vont proposer des projets. La question simple à laquelle ils doivent répondre est la suivante : Quelles sont les compétences dont nos étudiantes et nos étudiants ont besoin et comment leur transmettre ces compétences, entre autres celles internationales et interculturelles? »
« La crise du coronavirus a accéléré certaines tendances qui existaient auparavant, mentionne l’auteur de l’article Internationalisation de l’enseignement supérieur : 10 tendances à scruter en 2021 publié récemment par News Tank Éducation et recherche. La première est la régionalisation. Avec la crise du coronavirus, certains étudiants ont voulu partir à l’étranger, mais ont plutôt choisi des pays frontaliers. Cela fait écho aussi à certains pays qui ont une stratégie d’influence régionale, comme l’Arabie saoudite qui recrute dans le Golfe et au Moyen-Orient. »
« La deuxième tendance que j’observe et qui, je pense, va s’accélérer, est la compétition. La crise, souligne Monsieur Linden, a avivé la dimension compétition pour attirer les étudiants, les professeurs, les financements. Si les établissements souhaitent attirer des étudiants dans une zone autre que régionale, ils devront être plus compétitifs parce que la crise sanitaire a aussi engendré dans certains pays une crise économique. Certaines familles rencontrent maintenant plus de difficultés à financer les études à l’étranger de leurs enfants. Et puis, nous assistons aussi à l’émergence de nouveaux acteurs privés, à la formation en ligne, etc. Tout cela accentue la compétition dans le milieu de l’enseignement supérieur. »
« Parmi les autres tendances, termine-t-il, il y a celles de la digitalisation qui devrait se poursuivre et de la formation des étudiantes et des étudiants à une meilleure compréhension du monde. Est-ce qu’on devra leur donner des conseils pour être engagés dans le territoire où ils seront présents? Est-ce qu’il y aura des associations, des ONG qui pourront permettre aux établissements d’être davantage attractifs? Est ce qu’on offrira aussi la possibilité aux étudiantes et aux étudiants de s’impliquer sur des sujets sociaux, de développement durable ou autre? Et, enfin, il y aura aussi des choix qui seront faits par certains établissements selon les encouragements de certains gouvernements. »