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Visite de la ministre Martinez Ferrada au C2T3 affilié au Cégep de Trois-RivièresL’Institution Kiuna, déjà 10 ans pour le seul collège autochtone au Québec!
Le 15 mars 2021
Conçue par et pour les Premières Nations, mais ouverte à tous, l’Institution Kiuna est le seul collège autochtone du Québec. Située en plein territoire abénakis, à Odanak dans la région Centre-du-Québec, elle célèbre son 10e anniversaire cette année.
L’Institution Kiuna a comme mission de valoriser la culture et l’identité des Autochtones et de prôner les valeurs qui leur sont propres. Elle contribue à former des citoyens des Premières Nations compétents dans leur secteur d’activité, fiers héritiers de leur patrimoine culturel, socialement responsables, soucieux du bien-être de leur communauté et ouverts sur le monde.
« L’Institution Kiuna se différencie des autres collèges au Québec non seulement parce qu’elle est établie au sein d’une communauté, mais aussi par la clientèle qu’elle dessert, mentionne Prudence Hannis, directrice générale. Ses étudiantes et ses étudiants ne s’y retrouvent pas en position minoritaire. L’Institution Kiuna se distingue aussi par les membres de son corps enseignant et par son personnel, en majorité issu d’un premier peuple, qui peuvent mettre leur bagage au profit des étudiants. Leur expérience s’avère non seulement pédagogique, mais aussi terrain. »
« Au plan pédagogique, précise-t-elle, nous misons beaucoup sur l’apprentissage expérientiel. Nos programmes sont entièrement adaptés aux réalités, à la culture, aux traditions, à la vision du monde et à l’histoire passée et contemporaine des Premières Nations. Notre enseignement n’est pas juste dispensé par un enseignant. On a su conserver un lien dynamique constant avec les communautés et les organisations, avec celles qui nous ont mis au monde. Ceci est important pour l’enrichissement de l’expérience des étudiantes et des étudiants et, bien sûr, du curriculum, mais aussi pour exposer les jeunes à différents modèles de réussite. En plus de constituer une richesse, ceci nous aide à réaliser notre projet pédagogique au sein duquel notre culture se révèle omniprésente. »
Le Collège Manitou, son prédécesseur…
« Dans l’effervescence mondiale du fin des années 1960 et du début des années 1970, spécifie Madame Hannis, il y a eu une forte mobilisation politique pour pouvoir renverser les effets des lois coloniales et des pensionnats, un système éducatif qui sévissait depuis près de 100 ans. L’idée était de remettre la culture des Premières Nations et des premiers peuples, au centre des apprentissages dans le système éducatif. À l’époque, tout ce qui nous concernait était complètement occulté. On ne s’y retrouvait pas et on voulait renverser la vapeur. »
« Les communautés s’étaient alors engagées, poursuit-elle, dans une prise en charge de tous les domaines, incluant l’éducation. Le projet du Collège Manitou (1973-1976), qui a permis à 125 membres des premiers peuples d’obtenir un diplôme d’études collégiales en sciences humaines, nous a inspiré pour la création de l’Institution Kiuna. Celles et ceux qui ont franchi les portes du Collège Manitou (une ville complètement autonome en soi) ont continué à porter cette volonté, à l’effet que les jeunes que nous desservons aujourd’hui bénéficient d’un milieu plus pertinent aux plans culturel, des services, du contenu des cours, des compétences que l’on souhaite qu’ils acquièrent pour contribuer au développement des communautés. Dans une perspective plus large, notre collège s’inscrit dans un continuum d’apprentissage tout au long de la vie. Nos communautés ont pris en charge les volets préscolaire, primaire et secondaire. Nous souhaitons que l’Institution Kiuna devienne complètement autonome et sous la complète juridiction des Premières Nations. »
Cadre d’action
Centre d’étude collégial, l’Institution Kiuna relève du Conseil en Éducation des Premières Nations (CEPN). Cette instance évalue, administre et met en œuvre des programmes éducatifs pour 22 communautés des Premières Nations du Québec qui représentent huit nations, plus précisément les Abénakis, les Algonquins, les Atikamekw, les Hurons-Wendat, les Innus, les Malécites, les Micmacs et les Mohawks.
L’Institution Kiuna respecte les normes du ministère de l’Éducation et de l’Enseignement supérieur (MEES), bien qu’elle dispose d’une certaine latitude dans la formulation de son projet éducatif. Ses programmes répondent aux besoins de formation exprimés par les communautés des Premières Nations.
Elle bénéficie, de plus, de l’appui de partenaires tels que le Cégep de l’Abitibi-Témiscamingue et le Collège Dawson. « Ceux-ci nous ont permis jusqu’ici, ajoute Madame Hannis, de bénéficier d’un accompagnement aux plans de l’acquisition de compétences pour la gestion d’un établissement postsecondaire, des aptitudes pour développer des programmes et pour mettre sur pied divers services de même que de la compréhension des lois et des normes qui encadrent nos activités. On établit actuellement un plan de transfert pour finaliser les petits éléments pour atteindre notre pleine autonomie d’ici 2022. Il s’agit d’une belle aventure et d’un très beau partenariat avec ces deux institutions collégiales. »
Au service des Autochtones et des Allochtones
« En 2011, nous avons débuté avec 26 étudiantes et étudiants. Puis, de la deuxième année à 2019-2020, nous avons accueilli bon an mal an environ 60. Depuis la pandémie, à notre grande surprise, nous répondons à un besoin que nous n’avions pas estimé en terme d’ampleur. Nous sommes à plus de 90 étudiants, un record. Au cours des dix dernières années, il n’y a pas une Nation qui n’a pas été représentée. On compte près de 10 étudiantes et étudiants Allochtones actuellement. Si nous visons d’abord les jeunes des communautés, l’Institution Kiuna a toujours été ouverte à quiconque avait un intérêt pour les questions relatives aux Premières Nations, que l’intérêt soit de nature personnel ou professionnel. Sur nos 115 diplômés à ce jour, 114 sont issus des premiers peuples et nous comptons également, souligne Madame Hannis, une Québécoise. »
« Les cinq premières années, ajoute-t-elle, nous avons offert seulement le Diplôme d’études collégiales en sciences humaines, Premières Nations, pour son potentiel d’ouverture au niveau des études universitaires. Il s’agit de notre programme phare et du plus populaire encore actuellement. »
« Dès 2016, nous avons commencé à élargir notre offre de service, mentionne-t-elle avec une fierté évidente. Nous avons, dès lors, ajouté, le programme Lettres et communications, profil Langues des Premières Nations. Il s’agit d’un besoin criant pour les communautés de revitaliser la langue – je pense entre autres à l’abénakis – ou du moins de la préserver, de l’améliorer, non seulement pour en faire des locuteurs, mais pour contribuer aussi à soutenir les besoins des communautés au plan des aides-enseignants en langues. Nous sommes les seuls à offrir ce diplômes d’études collégiales. À l’automne 2020, nous avons ajouté le profil Cinéma autochtone. On collabore étroitement d’ailleurs avec la Wapikoni mobile, le studio ambulant de formation et de création audiovisuelle des Premières Nations. »
« On offre aussi, poursuit-elle, grâce à notre collaboration avec nos deux cégeps partenaires, différentes attestations d’études collégiales en fonction des besoins exprimés par les communautés. La plus populaire est Éducation spécialisée en contexte autochtone, pour laquelle nous en sommes en train de former notre cinquième cohorte. »
Et l’avenir?
« Nous souhaitions dès le départ être la référence en éducation autochtone dans l’Est du Canada. C’est vers cela que l’on chemine. Nous désirons continuer à faire rayonner l’expertise de l’Institution Kiuna, ses diplômés surtout, et les réussites, de même que de continuer à répondre aux besoins des communautés. Certains sont émergents en période de pandémie. On se rend compte que nous avons besoin de gens formés en technologies. Nous souhaitons enfin ajouter, tel que prévu avant même que nos murs soient érigés, un autre ordre d’enseignement, celui de l’enseignement universitaire. »
Avec la collaboration de Julie Gagné.